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Mes outils d’écriture

Quand on écrit, on se rend parfois compte que Word ou LibreOffice ne sont pas les outils idéaux. Ok, lorsqu’on appuie sur les touches du clavier, ce qu’on a en tête arrive progressivement sur l’écran mais rapidement, on aimerait ajouter ses notes et ses recherches dans la marge, on voudrait bouger le plan en quelques glissés de souris, on voudrait que la présentation soit adaptée automatiquement aux besoins des éditeurs*, on aimerait avoir quelques stats d’avancement pour se donner du courage, on aimerait gérer le plan en quelques clics, pouvoir transformer facilement son texte en scénario, que sais-je encore. Commence alors, chez certains auteurs maniaques dont je suis, la quête de l’outil ultime, l’outil qui nous fera prendre notre pied durant nos longues séances d’écriture.

Cette quête sans fin, je l’ai entreprise et je n’en ai toujours pas vu le bout. J’ai rencontré et aimé quelques logiciels que j’ai utilisés assez longtemps pour acquérir une certaine maîtrise, mais que j’ai abandonnés, appelé par d’autres sirènes. J’ai écrit sur des carnets, sur Notepad et même sur le traitement de texte d’un Psion !

Mon Psion REVO. Dans les années 2000, j’ai écrit quelques nouvelles avec ça.

J’ai testé régulièrement des outils originaux développés dans le garage et des bêtes de course créées par des équipes de développeurs chevronnés. Et toujours j’ai abandonné un outil pour passer à un autre. Las de ces recherches insatisfaites, j’ai fini par me demander « qu’est-ce que je cherche, en réalité ? »

J’ai tiré de mes réflexions un petit cahier des charges, qui m’a permis d’y voir plus clair dans mes attentes et, j’espère, m’aideront à trouver le dernier outil sur lequel je resterai jusqu’à ce que la mort nous sépare.

Mon cahier des charges

  • Ergonomie la plus simple possible (pas de boutons partout pour faire de la mise en page. Ce n’est pas mon travail d’auteur de maquetter et il y a mieux que les traitements de textes pour faire ça).
  • Pas d’outils « online ». Je veux pouvoir travailler n’importe où, sans risque de coupure de connexion (dans le train par exemple).
  • Outil multiplateforme, pouvant tourner sur mon Macbook et sur mon PC de travail. S’il tourne aussi sur tablette, pourquoi pas.
  • Evidemment, possibilité de synchronisation entre mes différentes machines
  • Outil maintenu dans le temps.
  • Qui ne me coûte pas un rein (je suis à la fois radin et fauché)
  • Capacité d’export
  • Fonctionnalité de traitement de texte avancées :
    • Gestion du plan facile
    • Notes de bas de pages
    • Commentaires
    • Gestion des références (pour quand je fais de la non fiction)
    • Prise de note avancée (stockage des notes, sauvegarde des recherches, fiches spécialisées…)
    • Export facile vers les principaux formats
    • Outils de correction ou intégration des outils de correction existants
    • Statistiques d’écriture exploitables
    • S’il a des options astucieuses auxquelles je n’ai pas pensé, je prends

Nous sommes d’accord, il s’agit de mon cahier des charges, pour mon usage personnel. Je suppose qu’il rejoint les besoins d’autres auteurs, mais que beaucoup d’autres n’ont pas besoin de tout ça. Chacun ses méthodes, chacun ses besoins. Cela dit, beaucoup d’outils correspondent à ce cahier des charges de nos jours (ce n’était pas le cas il y a 20 ans, où on devait souvent programmer des macros Word en VBA pour ajouter les fonctions manquantes ou customiser l’interface).

22 ans de traitements de textes : mon TOP 5

Voici le classement issu de milliers d’heures de pratiques, avec les + et les -. Il s’agit de mon avis personnel, et seulement sur les outils qui m’ont semblé assez solide pour écrire un roman entier avec. Oublions les bousins que j’ai testés 2 heures avant de les désinstaller. Il y en a trop. J’ai aussi retiré les outils qui n’existent plus du tout, comme Storyview, qui était particulièrement intéressant. Je n’ai pas placé les outils très spécialisés, comme Aeon Timeline, qui ne sont pas des traitements de texte, mais de l’aide à l’écriture. Sont exclus aussi les outils spécialisés dans le scénario, comme Celtx ou Final Draft, même si on peut les utiliser pour écrire un roman.

#Nom de l’outilAvantages +Inconvénients –
1
Storyist (V4)
– TRES simple d’utilisation
Orienté roman, avec beaucoup de fonctionnalités : organisation des recherches, plan, modèles…
– Export facile
Ne gère pas les notes de bas de page !!
– Mac et ipad seulement
– Développeurs pas à l’écoute
– Doutes sur la pérennité de l’outil dans le temps
2
Writemonkey 3
– Gratuit ou presque (on gagne quelques options supplémentaires, mais pas indispensables, après une petite donation).
– 100% Markdown** (j’adore le markdown).
– Gestion des projets très simple.
Développé par un auteur pour les auteurs, avec des tonnes d’idées allant de géniales à rigolotes, comme le bruit de machine à écrire personnalisable.
– Dispo pour Mac, PC et Linux.
– Installation « portable », sans droit administrateur. Vous dézippé et c’est parti !
– Pas opensource, donc pas de communauté de développeurs.
L’outil est maintenu (V3.3 sortie en janvier), mais le développement repose sur une seule personne. Le retour client en cas de bug peut être très long.
– Exports compliqués
, sans aperçu, avec des problèmes de conversion de caractères (réglé semble-t-il avec un nouveau plugin Pandoc).
3
Ulysses (version chais plus)
Aussi sympa que Writemonkey, quand on aime les outils épurés et le markdown.
– Orienté auteur, avec beaucoup de fonctionnalité très pratiques.
– Très facile d’utilisation.
– Mac et ipad seulement.
Système d’abonnement mensuel ou annuel qui m’a refroidi directement. La version gratuite ne me suffisait pas.
4
Scrivener 3
(j’ai utilisé aussi la V2)
– Disponible sur toutes plateformes.
Sans doute l’outil le plus complet pour écrire. On peut vraiment tout faire.
– Jumelable avec Aeon Timeline, l’excellent outil de planification d’écriture.
– Un prix dans la fourchette haute mais avec une longue période d’essai.
– Le succès commercial semble assurer la pérennité de l’outil.
Lourd, avec parfois une ergonomie digne de Latex sous Linux.
– Certaines fonctions qu’on aimerait simples sont de vraies usines à gaz.
Si on travaille sous Mac et sous PC, il faut payer 2 licences !!
– Le service client ne répond jamais.
5
Mellel (version 5)
– Fait le job.
Plus proche de Storyist que de Scrivener.
– Des fonctionnalités autour de la structure du roman qui peuvent séduire les auteurs débutants.
– Mac seulement.
– Pas moyen de stocker ses recherches.
Storyist en plus fade. N’apporte pas beaucoup plus qu’un traitement de texte classique, à mon avis.
Cher pour ce que c’est (de 50 à 90$ suivant les options).

Évidemment, c’est un avis très subjectif et je ne doute pas que les supporters de chaque outil sont susceptibles de se vexer, voire de payer un billet de train pour venir me casser la gueule, mais ils ne savent pas où j’habite (et d’une) et je pratique des trucs martiaux avec des armes, venez je vous attends (et de deux). Le seul critère de ce classement, c’est : « l’outil me plait-il ? Me permet-il d’écrire plus efficacement, à ma façon, sans réduire le plaisir ? ». Certains se contentent très bien de petits zenwares minimalistes (comme le très bon Focuswriter ou iA Writer), ou même d’un petit bloc-notes et d’un stylo. D’autres ne jurent que par un éditeur de code, par Storyist ou par Scrivener. Ils ont tous raison, on est bien d’accord.

La quête continue : Obsidian

Vous avez pu le noter dans mon TOP5, j’apprécie les outils sobres, simples, et je n’ai pas peur d’écrire directement en Markdown dans des interfaces épurées, voire minimalistes (pour tout dire, j’ai longtemps hésité à mettre Writemonkey en tête du classement pour cette raison). Cependant, j’aime mon petit confort et j’ai trop besoin de fonctions avancées pour écrire sur un éditeur de texte de base.

Puisque les développeurs de Storyist ne semblent pas partis pour ajouter des fonctionnalités de notes de bas de page que tous leurs utilisateurs réclament depuis des années, et que Writemonkey est toujours maintenu épisodiquement, il me semble normal de chercher un outil du même type sans leurs inconvénients.

Et c’est pourquoi je suis en train d’écrire mon nouveau roman directement dans Obsidian.

AvantagesInconvénients

Obsidian
– Gratuit et opensource
– Multiplateforme
– Forte communauté de développeurs, créant un nombre incroyable de plugins pour tous les usages.
– Markdown, mais avec des raccourcis, un aperçu final…
– Export très complet (doc, odt, epub, html, pdf…) après l’installation de Pandoc.
– Plein de modules optionnels, permettant d’ajouter des stats d’écriture
– Possibilité d’organisation de ses recherches, de la gestion du plan, de fusion des notes etc.
– Fichiers sauvegardés en texte, réutilisable sur n’importe quel outil par la suite
– Apprentissage de la syntaxe Markdown nécessaire.
– Il faut configurer l’application après installation pour bien en profiter et installer pas mal de modules.
– Installation de Pandoc pas très intuitive (mais pas si difficile que ça non plus)
– Le cloud Obsidian optionnel n’est pas gratuit (et cher pour une application d’écrivain)

Ajoutons comme avantage le fait que l’installateur de l’outil pour PC est une bête zip autoextractable, ne nécessitant aucun droit administrateur. Il est donc généralement possible de l’installer sur un ordinateur de travail sécurisé. Important pour moi, qui aime bien travailler à la pause déjeuner sur le PC fourni par mon employeur.

Après avoir installé un module de statistique d’écriture, Pandoc et le module d’export et configuré l’interface, j’ai pu commencer à écrire. Une nouvelle entière plus tard (et après le transfert de mon dernier roman de Scrivener à Obsidian) le bilan est le suivant :

Positif

+ L’outil est très proche de Writemonkey, mais plus stable, avec une interface un peu plus simple. 
+ La gestion des hashtags est très pratique pour créer des états d’avancement (draft, final draft, ce que vous voulez !)
+ Aucun problème pour gérer les recherches, les fiches perso, le plan du roman, etc. Tout se range dans l’arborescence du dossier. Il est possible d’insérer des images, des liens, etc.
+ Il faut apprendre à se servir de Pandoc pour avoir les extractions qu’on vent, avec des mises en pages sophistiquées, mais on peut aussi bien produire des .DOC que des EPBUB très facilement.
+ La richesse des modules est incroyable ! C’est aussi un défaut, parce que sans guide, on peut passer des heures à fouiller dans la liste.
+ L’aperçu du rendu final est très utile pour ceux qui ne sont pas familiers du Markdown.
+ La fonction « journal quotidien », la fonction Canvas et la vue graphique sont trois gadgets dont vous ne pourrez plus vous passer.
+ Il est possible d’utiliser Obsidian pour publier des notes sur les réseaux sociaux. Je n’ai pas encore exploré cette fonctionnalité, mais ça m’intéresse d’essayer.
+ L’usage est tellement souple que vous pouvez l’utiliser pour absolument n’importe quel type d’écriture : la simple prise de notes, la création d’un wiki personnel, la création de todolist et jusqu’à l’écriture de roman, bien sûr.

Négatif

– On ne trouve pas tous les gadgets de Writemonkeys, mais des modules sont ajoutés régulièrement. Donc qui sait… ?
– Certains modules ne fonctionnent pas très bien et il m’a fallu plusieurs heures pour tester et installer ceux dont j’avais besoin. 
– La gestion des références documentaires peut être fastidieuse, du fait du Markdown. Un plugin permet d’utiliser Zotero pour pallier à ces difficultés, mais je n’ai pas eu le temps de le tester.
– Si vous faites un plan façon Scrivener, éclaté dans une arborescence, la réconciliation se fait avec une fonction de fusion. Contrairement à Scrivener, elle vous demandera quelques minutes fichier par fichier. C’est assez fastidieux.
– Obsidian est très très très puissant. Mais pour exploiter à fond cette puissance, il faut se pencher assez longuement sur son fonctionnement, ou celui de ses modules. Et franchement, on a autre chose à faire de notre vie.

Sortie de tout ça, j’aurai tendance à classer Obsidian juste au-dessus de Writemonkey, mais ça se discute. Storyiste reste pour moi l’outil qui me faisait gagner le plus de temps. Mais maintenant que tout est configuré, même ça, ça se discute. On verra après le travail sur mon roman en cour si je change d’avis.

Et d’ici là, je vous ferai un article un peu plus détaillé sur l’outil et ses modules. Promis !

En attendant, écrivez comme et avec ce que vous voulez, mais surtout, écrivez !


* Les éditeurs ont des besoins de typographie spécifiques. On peut considérer que c’est leur problème et leur envoyer un manuscrit sans guillemets chevrons, sans espaces insécables et avec des tabulations faites à grands coups de barre espace, mais c’est souvent un correcteur ou un maquetteur sous payé qui va se taper le travail pour pas un sou de plus. Donc faites un effort : donner des manuscrits propres !

** Le Markdown est une syntaxe simple qui permet de taper le formatage du texte sans passer par des menus ou des boutons. Par exemple, on notera l’italique en encadrant le texte à formater par des astérisques : *italique*. Pareil pour le **gras**, les ^[notes de bas de pages], les %%commentaires%% etc. Avec de la pratique, c’est un gain de temps non négligeable et une façon de passer facilement d’un logiciel à l’autre.

2 commentaires sur “Mes outils d’écriture”

  1. Merci pour cet article assez complet et simple pour se rendre facilement compte des avantages et inconvénients de chaque outils. J’en ai utilisé plusieurs et je partage votre point de vue sur beaucoup de points.
    J’étais curieux d’avoir votre avis sur Obsidian utilisé de cette façon, ça rejoint ce que j’ai testé et je le garde comme outils de prise de notes et Scrivener pour l’écriture (mais c’est totalement subjectif).
    Encore merci pour ce partage, ça me permet de ne pas tester certains outils qui ne correspondront clairement pas à ma façon de travailler, et donc vous me faites gagner du temps!

  2. Merci beaucoup pour ce partage d’expérience, de vécu mais surtout d’outils.
    Tellement de possibilités et une seule vie pour toute les explorer en ce moment !
    Autant dire qu’il y a moult notions dans ce post qui me sont inconnues, mais c’est cela d’initier une démarche d’écriture…
    Dans tous les cas, je souligne que je n’ai aucune envie de venir me confronter à vous même si je ne comprends pas tout !
    C’est aussi à moi le me mettre à la page.
    Même si elle peut être blanche certains jours!

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